• Saint Pierre de Rome, le 29 avril 1923

    Discours de S. S. PIE XI. lors de l'Approbation des miracles approuvés pour la Béatification de Ste Thérèse de l'Enfant-Jésus.
     
    Il est certain que la voix de Dieu et la voix du peuple se sont comme divinement unies pour exalter la Vénérable Thérèse de l'Enfant-Jésus; mais c'est la voix de Dieu qui s'est fait entendre la première; ce n'est pas elle qui s'est harmonisée avec celle du peuple, c'est la voix du peuple qui a reconnu et suivi la voix de Dieu. Oui, la voix de Dieu s'est fait entendre la première, tout d'abord dans l'incomparable préparation dont nous admirons aujourd'hui les splendeurs, et c'est Dieu lui-même, en définitive, que nous admirons dans les vertus véritablement héroïques de cette créature toute céleste. La voix du peuple s'est élevée ensuite, sans délai, voix d'un peuple fervent, suppliant et qui venait en pèlerin vers elle.
    A cette voix du peuple, les miracles sont venus ajouter leur éloquence, et c'est vraiment Dieu qui, dans cette harmonie merveilleuse, nous fait entendre sa voix dans toute sa force et dans toute sa magnificence : Vox Domini in virtute, vox Domini in magnificentia. Oui, c'est la voix de Dieu qui préparait cette âme pour lui faire gravir, rapide et légère comme un cerf, les plus sublimes hauteurs de la perfection Vox Domini praeparantis cervos. C'est la voix de Dieu qui, par le resplendissement des miracles, révélait le trésor des vertus qu'il avait condensées dans ce coeur : Vox Domini revelabit condensa, car les vertus de cette grande âme sont un vrai miracle : A Domino factum est istud et est mirabile in oculis nostris. Il suffit de lire la vie de la « petite Thérèse », fût-ce dans un récit abrégé, pour se sentir le droit de dire d'elle, en empruntant les expressions du divin poète, qu'elle est la chose descendue du ciel sur terre pour nous montrer un miracle : Cosa venuta di cielo in terra a miracolo mostrare.
    Or ce miracle-là est tout plein d'enseignements aussi propres à glorifier Dieu qu'ils nous sont profitables. L'opulente vertu de Dieu, la richesse infinie de l'artiste divin se manifestent à nous dans l'ordre surnaturel comme dans l'ordre naturel. On dirait même que la connaissance de l'ordre naturel est pour nous comme une initiation et une introduction à l'intelligence, bien autrement précieuse, de l'ordre surnaturel.
    Le même Dieu qui lance dans l'espace, réglées avec une harmonie merveilleuse, les masses imposantes des mondes, taille aussi, dans le secret de la roche, les facettes des cristaux qui ne disent pas moins éloquemment la perfection de sa sagesse ; la même main qui suscite les géants de la vie, sur la terre et dans les océans, forme aussi les invisibles organismes des infiniment petits.
    Il en est ainsi dans l'ordre surnaturel. Pour nous en tenir aux derniers centenaires, le même Dieu qui suscite ces géants de la sainteté et de l'apostolat que furent saint Ignace et saint François Xavier, derrière lesquels se dressent, toujours resplendissantes à l'horizon de la vie spirituelle, les figures incomparables de Pierre et de Paul, d'Athanase, de Chrysostome, d'Ambroise et de Charles Borromée. le même Dieu se révèle en ce moment à nous comme celui qui, avec un amour infini, a formé dans le secret, telle une miniature exquisément fine de sainteté parfaite, cette tout humble, toute petite et si virginale enfant. Reconnaissez ici dans l'ordre surnaturel le même précédé auquel Dieu se plaît à recourir dans l'ordre naturel, ainsi que l'a chanté le poète chrétien dont nous célébrerons prochainement le cinquantenaire : « Dieu fait surgir de nos champs l'épi nourricier et le lin pour nous vêtir; il répand dans les plantes des essences médicinales. C'est lui qui a créé le pin qui brave les vents et le saule que courbe la main, le sapin qui résisté aux hivers et le peuplier qui ne craint pas les eaux, et c'est lui aussi qui fait naître la fleur dont le fin tissu étale pour lui seul la magnificence de son coloris, qui exhale vers le ciel les parfums de son calice et qui meurt en silence. » Cette fleur silencieuse, ce tissu aux teintes resplendissantes, ce parfum qui se répand au large, cette beauté qui ne se montre qu'au regard de Dieu, n'est-ce pas la petite Thérèse de l'Enfant-Jésus?
    Quelle est la parole que, Dieu veut nous dire?
    Que veut nous dire la « petite Thérèse », qui s'est faite, elle aussi, une parole de Dieu ? car Dieu parle par ses oeuvres et c'est le propre de ceux qui lui sont le plus unis de nous parler, eux aussi, non par des mots, mais par leurs oeuvres. Dieu nous dit, et la « petite Thérèse » avec lui, qu'il est une chose, sinon plus grande, du moins aussi grande que l'action et la puissance du génie, une chose qui, devant Dieu, est aussi précieuse que les grandes qualités de sagesse et d'organisation, si efficaces pourtant dans l'apostolat chrétien, telles que — pour rester toujours dans le souvenir des récents centenaires — celles de saint François de Sales et de sainte Thérèse de Jésus.
    Oui, il est une chose qui, devant Dieu, est au moins aussi précieuse : c'est l'humilité, la douce et sincère humilité du coeur, la fidélité totale' au devoir d'état, quel qu'il soit, en quelque sphère et à quelque degré de la hiérarchie humaine que Dieu nous ait placés et appelés à travailler, la disposition à tous les sacrifices, l'abandon confiant dans la main et le coeur de Dieu, et par-dessus tout la charité vraie, le réel amour de Dieu, la tendresse véritable pour Jésus-Christ, répondant à la tendresse qu'il nous a lui-même témoignée, cette charité qui — comme l'Apôtre le disait aux fidèles de Corinthe et que ce dimanche-ci, non sans une providentielle coïncidence, l'Eglise nous rappelle — est bienveillante, patiente, toujours active et supportant tout, prête à tous les dévouements et à toutes les immolations. C'est là une voie qui, sans permettre à tous d'atteindre les hauteurs auxquelles Dieu a conduit Thérèse, est non seulement possible, mais facile pour tous. Comme l'observe saint Augustin, tout le monde ne peut pas prêcher et faire de grandes oeuvres. Mais qui donc est incapable de prier, de s'humilier et d'aimer?
    Telle est la leçon que la « petite Thérèse » nous offre aujourd'hui, afin que nous puissions élever nos aspirations à la perfection de la vie chrétienne. Et c'est dans la splendide lumière de ces réalités ineffables que, de tout coeur, Nous félicitons la famille religieuse du Carmel de la nouvelle fleur que la charité du Coeur divin a fait surgir dans son jardin ; Nous vous félicitons, Eminentissime Seigneur (1), et tous ceux qui ont coopéré à conduire à bon terme une si belle entreprise.
    (1) S. E. le Cardinal Vico, Ponent de la Cause.
    En cet anniversaire de l'apparition de Lourdes terminant la première année de Notre Pontificat, Nous remercions Dieu d'avoir voulu joindre aux heureux auspices qui, par la Vierge Immaculée, avaient présidé à Notre exaltation, les promesses Nous venant de la chère Etoile qu'est Thérèse de l'Enfant-Jésus, miracle de vertus et prodige de miracles. Nous lui recommandons, non seulement Notre pauvre et humble Personne, non seulement les oeuvres d'évangélisation confiées à l'Ordre du Carmel, et toutes les Missions qui lui furent si chères et qui lui inspirèrent des accents si fervents et de si hautes aspirations, mais aussi toute l'Eglise, toute l'immense famille que le Coeur de Dieu a daigné léguer à Notre coeur, et, de ce coeur, Nous tirons la plus chaleureuse et abondante bénédiction pour tous et chacun de vous, pour tout ce qui occupe votre esprit et votre coeur, afin qu'elle pénètre partout où pénètrent vos pensées et vos affections.
     
     
    La cérémonie fixée au 29 avril 1923 se déroula solennellement dans la basilique de Saint-Pierre de Rome pour la plus grande joie des protégés de Thérèse.
     
    Voici quelle fut la prière au moment de la béatification de Thérèse :
     
    O Bienheureuse " petite Thérèse ", usez maintenant plus que jamais de votre puissant crédit auprès de Dieu, en faveur de ceux qui vous aiment ! En vous glorifiant, nous le savons, l'Église, nous convie à suivre cette voie d'enfance spirituelle qu'il est venue autrefois révéler au monde et dont vous avez lumineusement retracé le sillage. Attirez donc toutes les âmes à l'humilité, par l'odeur de vos parfums si suaves, et conduisez-les, simples et confiantes, dans les bras de leur Père des Cieux.
     
     
       Bonne célébration du 100e Anniversaire de béatification de notre amie et petite soeur Thérèse ! yes
     
     
     

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